Réponse Houmbaba : Les savoirs, les techniques et les standards internationaux d’étude, de suivi et de gestion du loup existent -depuis la date d’autorisation de l’utilisation de la capture scientifique avec le piège type « easy grap », testé en 2006 et qui a fait l’objet d’un dérogation d’utilisation pour la France en 2009- et ils n’ont pas été mis en place en France. Donc, si ça coûte cher, rien n’a été fait pour que ça coûte moins cher. Là est peut-être aussi l’objectif ou la raison cachée. Car si le loup coûte, il rapporte aussi beaucoup !

>> La vérité, c’est bien que les loups français coûtent et « rapportent » de plus en plus d’argent, près de 12 millions d’euros (indemnisation des moutons tués et mesures de protection) en 2012.

Ramenée au chiffre (officiel) de loups, la France peut s’enorgueillir d’avoir les loups… les plus chers au monde : 48 000 euros/loup/an (coût de la protection et de l’indemnisation en 2012), 8 000 euros/loup/an (coût d’indemnisation seul) pour 250 loups (contre 30 $/loup/an pour une population de 2 700 loups aux USA). C’est bien le paradoxe et le principal résultat de la stratégie française, « attendre les attaques avant d’agir », des gouvernements successifs depuis 20 ans. Alors que la présence du loup sur un territoire constitue aussi une  opportunité économique majeure.

En Europe, comme aux Etats-Unis, la présence du loup augmente l’attractivité touristique des régions et provoque une forte croissance d’activités. Or, la première ressource économique de la France est le tourisme.

Selon une étude menée par des chercheurs de l’université du Montana, le loup, réintroduit en 1995 dans le Parc de Yellowstone, est devenu depuis le premier motif de visites du parc : les visiteurs viennent voir le loup, voir ses traces ou l’entendre. En 2005, 153 000 personnes avaient déjà pu l’observer[1]. Sa présence permet ainsi de générer : 110 millions d’euros (retombées directes et indirectes), 85 millions d’euros au Parc et 25 millions d’euros à l ‘économie locale.

Dans les Abruzzes, la présence du loup -avec l’ours brun- est à l’origine du taux de fréquentation élevé  du Parc National avec 2 millions de visiteurs chaque année. Le budget annuel du parc qui s’élève à environ 2,5 millions d’euros entraîne une activité induite de 150  millions d’euros pour l’économie locale (Patrimonio, 1997), agrotourisme compris.

Les loups d’aujourd’hui ne sont pas les loups d’hier. Il est donc étonnant qu’aucun dispositif scientifique, indépendant[2] et pérenne, ne soit en place pour connaître et suivre le comportement et l’écologie des « loups français », les modalités de leur colonisation, la composition[3] des meutes comme la complexité de leurs relations, la plasticité de l’animal en fonction des territoires. Et surtout pour savoir quels sont les loups responsables des attaques récurrentes sur les troupeaux (sur un nombre restreint d’entre eux au final). Faute d’utiliser la seule technique possible connue pour l’étude du comportement, le suivi continu des populations et le contrôle des conflits avec l’élevage, la capture scientifique. Ce qui revient à prétendre faire de la biologie cellulaire sans utiliser de microscope !

Pourquoi ce déni dans l’utilisation d’une technique indispensable à l’acquisition des savoirs qui manquent cruellement à l’Etat pour exercer sa souveraineté, savoir pour agir, à la société pour se protéger et apprendre à cohabiter ? Pourquoi cet obscurantisme, cette vanité et cette volonté affichée que rien ne se passe ?

Alors que les conflits récurrents avec l’élevage restent entiers et prennent de l’ampleur chaque année (sans aucune comparaison avec ce qui se passe ailleurs en Europe ou en Amérique du Nord) au rythme de l’expansion de l’espèce et gagnent les bastions de l’élevage français. Et que dans le même temps, notre pays se prive du développement d’une économie basée sur la présence du loup, source d’innovations dans des régions « défavorisées ». Là où le retour de l’animal invite et oblige à penser une autre légitimité, fondée sur un cadre politique où puissent s’exprimer à la fois les intérêts des hommes… et des loups, avec eux la pérennité des autres espèces et du monde vivant. Là où justement les politiques en faveur de la biodiversité comme du climat ont jusqu’à présent échoué à le faire.. !



[1]              P.J. White et al, 2005, p. 40.Yellowstone after wolves, EIS Prediction and Ten Year Appraisals, Yellowstone Science, volume 13 (1), Winter 2005, p. 34-41.

[2] L’indépendance de l’expertise scientifique est posée au sein du GNL, l’ONCFS étant à la fois l’outil de souveraineté de l’Etat, de la police de l’environnement, le garant du statut de l’espèce et de sa protection, l’instance technique en charge de son suivi (information, formation, recueil et validation des témoignages et des données, désignation des ZPP, estimation des effectifs…) et de sa destruction (tirs de prélèvement). Et il serait même très inquiétant que des « hommes de loi » prétendent produire de la science…

[3] La composition des meutes est un des facteurs qui guide le comportement des meutes et la défense des territoires (Smith D.W. 2005. Ten years after : an intimate account of the Yellowstone wolf story. Yellowstone Science, vol.13 (1), Winter 2005, p. 7-21.

 

 

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